Après mûre réflexion, je pense
que je pose mal la problématique. Ce n’est pas la maladie qu’il faut essayer de
combattre, mais les effets secondaires de la chimiothérapie. Depuis le 6 août
date de mon dernier article, j’ai été dans l’incapacité de réagir tant
physiquement que psychologiquement. Le physique n’est pas le plus dur à
surmonter, c’est psychologiquement que c’est difficile. Je suis assaillie par
de nombreuses questions existentialistes qui me font douter de la nécessité
voire de l’intérêt de tant de souffrances. Pourquoi infliger au corps toute
cette douleur pour finir par l’abandonner aux vers enseveli dans un cercueil
aussi capitonné soit-il ? Pourquoi continuer le traitement, je ne voulais
plus me battre. J’en avais assez et si près «du but » !!!
J’étais à deux doigts de
signifier mon abandon au médecin quand j’ai été admise en urgence à Curie pour
des complications. J’ai partagé ma chambre pendant une semaine avec une dame
d’à peu près mon âge d’origine algérienne.
Chaque jour, malgré la douleur, elle trainait sa perfusion dans la salle
bains, faisait ses ablutions, s’installait dans son lit, un oreiller sur les
genoux, un foulard sur la tête et faisait ainsi, chaque jour ses cinq prières.
Quand la douleur était trop grande elle prenait son Coran et lisait quelques
pages. Son histoire ? un cancer du sein guérit puis quelques années plus
tard une rechute avec des métastases dans le foie, les reins et une méningite
pour couronner le tout. Cela faisait une année qu’elle suivait sa cure de
chimio avec une bonne dose de corticoïdes. Elle n’avait pas d’enfant, mais
avait son mari à ses côtés dans toutes ces épreuves.
Elle me redonna du courage, car
je compris que j’étais ingrate envers Dieu. Nous n ‘avons certes pas le même
seuil de tolérance de la souffrance, mais elle m’a redonné de l’espoir car
j’avais plus qu’elle n’aura jamais : un fils. Un fils né d’un ovaire une
fois déjà sauvé du cancer. Puis je me suis souvenue de la chanson du chanteur
togolais qui dit : vous pensez qu’il n’y a que vous qui souffrez, la
souffrance est partout, dans la maison du riche comme du pauvre. La souffrance
est de différente sorte….Quand d’autres vous racontent leurs souffrances, vous
oubliez les vôtres, car il y a différents niveaux de souffrance. ».
C’est bon je vais me relever et
repartir, ne serait-ce que pour mon fils et ma petite-fille. Pouvoir
reconnaitre qu’on a mis un genou à terre et avoir perdu une bataille, c’est la
reconnaissance que l’on est vulnérable et mortelle, mais c’est aussi
l’assurance de plus de pugnacité pour la suite du combat.
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